mercredi 11 septembre 2013

Albert, cet humaniste



"Placer l'homme au cœur de l'entreprise."

Je pense qu'Albert a confondu ce credo avec le jeu de fléchettes.

Son truc, lui, c'est d'aller à des conférences, afin de tendre vers un nouveau management où l'homme, donc, serait au cœur de l'entreprise. Genre, le salarié aurait le droit d'être considéré comme un être vivant, avec un cœur qui bat, des failles, un cerveau qui fonctionne avec ses deux hémisphères, toussa, toussa.

Dans la réalité, c'est un peu "marche ou crève".

Albert fait des leçons d'humanisme mais pourrit ses "collaborateurs" (ah ah) à la moindre occasion. Il a des copains soi-disant partout mais les gens bavent aussi sur son compte, un peu écœurés ou carrément désabusés. Il passe son temps à cracher sur les autres, en affirmant que c'est leur faute. Il broie les gens, les uns après les autres. Les pousse à l'incompréhension, puis à la colère, à l'angoisse, au désespoir, au malheur.

Il éructe, il hurle, il rit aux éclats, il invective de nouveau en disant "c'est toi qui dis qui y est".

Albert n'est pas un enfant. Albert est un homme de presque 50 ans.

Mon enfant, justement, m'a demandé si, quand même, c'était pas un peu gênant, ce blog. "Et si Albert, il le lit, il va faire quoi?" a-t-il ajouté.

Il va me virer?

Il serait capable de rire - jaune, certes, mais de rire. Il me ferait une grande leçon sur la sérénité, l'acupuncture, la maîtrise de soi, le flux des énergies... en pointant du doigt les jolies cartes postales qu'il a placées derrière mon bureau, des fleurs de lotus, des étoiles de mer rouges, un tournesol, des coquelicots... Il m'expliquerait qu'on ne fait pas d'omelette sans casser d'œufs, qu'en fait, travailler à trois plutôt qu'à douze, c'est drôlement plus intéressant, en termes de challenge.

En attendant, il dit qu'il n'a pas le temps de s'apitoyer sur les gens. Que les personnes assument leurs choix. Qu'elles n'ont pas été à la hauteur des événements. Qu'il a une entreprise à gérer, lui. Des gens à "évangéliser". Un truc à inventer, dans ce "nouveau paradigme" que nous vivons.

Albert est fou. Et côtoyer un fou en chair et en os, avec de vrais morceaux de neurones aplaties dedans, n'est finalement pas si fréquent, dans un monde de névrosés.

2 commentaires:

  1. Bin....perso, je me demande si finalement, si, le dingue ne serait pas en expansion dans ce beau monde joyeux.

    ça n'a rien de rassurant, comme constat.

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  2. Nous avons tous un grain. Certains ont le stock nécessaire pour faire tourner un moulin à eux tout seuls.

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